Pourquoi les Français sont-ils accros aux médicaments ?
MEDICAMENTS : L’appétence des Français pour leurs pilules miracles : prescriptions médicales bien plus qu’ailleurs en Europe : France 90% ; Pays Bas : 43% Chercher l'erreur. L'abus du pouvoir magique. Pour les maladies dégénératives les médicaments se révèlent peu efficaces. Y a t il une différence entre effet thérapeutique et pharmacologie?
C’est ce que se demande Anne Prigent dans Le Figaro. La journaliste indique ainsi qu’« encore trop souvent et bien plus qu’ailleurs en Europe, une consultation se termine par la prescription d’un médicament. Mais les lignes sont en train de bouger ».
Anne Prigent explique que :« En France 9 consultations sur 10, en France, se terminent par une prescription de médicament. (soit 90%). - En Espagne c’est 83%, - en Allemagne 72% et - aux Pays-Bas 43% ! ».
« Ces chiffres, issus d’une enquête de l’Assurance-maladie de 2005, ont probablement diminué depuis la succession de scandales sanitaires impliquant des médicaments. Mais l’ordonnance a encore de beaux jours devant elle. Cette mauvaise habitude n’est probablement pas étrangère au succès de l’homéopathie en France : pour un certain nombre de médecins, prescrire des granules permet de satisfaire un patient à peu de frais, sans lui faire prendre un produit actif dont il n’a pas besoin », continue la journaliste.
Elle poursuit : « Pourquoi cette place particulière du médicament dans la consultation médicale en France ? La réponse est, comme souvent, multiple. Tout d’abord, [...] s’en voir prescrire un est une façon symbolique d’être reconnu comme malade ».
Le Pr Rémy Boussageon, membre du Collège national des généralistes enseignants, ajoute que « la prescription est un pouvoir spécifique donné au médecin. C’est ce qui le différencie des autres soignants ».
« Un pouvoir qui s’est révélé quasi magique pendant des années. Car la pharmacopée moderne, qui a connu son essor après la Seconde Guerre mondiale, s’est révélée extrêmement efficace : antibiotiques, neuroleptiques ou encore cortisone ont sauvé des millions de vies »,remarque Anne Prigent.
Jocelyn Raude, enseignant-chercheur en psychologie sociale, souligne que « depuis, nous sommes passés des maladies infectieuses aux maladies dégénératives, pour lesquelles les médicaments se révèlent moins efficaces ».
« Pourtant, le médicament demeure trop souvent la solution de facilité pour les médecins », poursuit la journaliste. Le Pr Boussageon déclare que les praticiens « doivent être mieux formés aux traitements non médicamenteux, c’est-à-dire qu’il ne faut pas confondre thérapeutique et pharmacologie ».
Anne Prigent relève en outre que « les malades sont devenus plus difficiles à prendre en charge. Avec une population vieillissante, ils sont souvent «polypathologiques» ».
Le Pr Dominique Deplanque, président du Collège national de pharmacologie médicale, observe ainsi : « Nous avons longtemps été dans des logiques de recettes : à telle pathologie on donne tel médicament. La réflexion est aujourd’hui plus complexe. Les réponses médicamenteuses doivent être réfléchies au cas par cas. Même dans une pathologie chronique, les médicaments ne doivent pas toujours être donnés à vie ».
Anne Prigent remarque que « cette analyse critique de la prescription reste encore trop souvent un vœu pieux par manque de formation ».
« Une faiblesse qui a rendu [les médecins] perméables aux discours des laboratoires pharmaceutiques. Pour Sylvie Fainzang, anthropologue, [...] c’est même la raison principale de l’appétence des Français pour leurs pilules miracles », relève la journaliste.
La chercheuse note qu’« il existe un tel harcèlement publicitaire de la part des laboratoires que le réflexe de prescription est devenu systématique. Et de fait, les patients se sont habitués à se voir prescrire des médicaments ».
Elle observe cependant que « - de plus en plus de patients préfèrent les médecins qui prescrivent peu. Ou alors - ils font eux-mêmes le tri et ne prennent pas tous les médicaments prescrits ».
Anne Prigent ajoute que « du côté des médecins, les lignes sont aussi en train de bouger. Outre la législation, qui a évolué au fil du temps pour tenter de limiter l’influence des laboratoires, les médecins sont de plus en plus conscients des limites des médicaments. De plus, les thérapeutiques non médicamenteuses sont désormais mises en valeur par les autorités de santé ».
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